Territoires

Conférence RexelExpo : L’intelligence collective au service de la ville de demain

80 % de la ville de 2050 existe déjà. Alors que les fantasmes de la smart city s’estompent, promoteurs, énergéticiens et financeurs publics partagent un même constat : la transition énergétique urbaine se jouera moins dans la construction neuve que dans la transformation intelligente de l’existant. Un chantier moins spectaculaire, peut-être, mais autrement plus décisif.

Conférence RexelExpo : L’intelligence collective au service de la ville de demain

Appréhendez les enjeux de la ville de demain avec nos intervenants :

  • Sébastien Illouz, Responsable du pôle Efficacité Énergétique, Caisse des Dépôts / Banque des Territoires
  • Ludovic Coutant, Responsable Advenir, Avere France
  • Caroline Gattino, Head of sales, France Bénélux, Maghreb, Siemens
  • Edward Arkwright, Directeur général, Altarea
  • Grégoire Morineaux, Directeur stratégie, innovation et achats Rexel France

 

À Rexel Expo, Edward Arkwright, directeur général d’Altarea, ouvre le débat en rappelant la modestie nécessaire : la ville intelligente, c’est « d’abord, l’intelligence de celles et ceux qui la font. ». Exit les promesses d’une smart city ultra-connectée pilotée par algorithmes : place à une approche pragmatique, où dialoguent innovation et cohésion sociale.

Sébastien Illouz, responsable du pôle efficacité énergétique à la Caisse des Dépôts, rappelle qu’en 2016, la Banque des Territoires avait publié un mémoire provocateur : « Smart City versus Stupid Village ». Neuf ans plus tard, le message tient toujours. « Si 80 % de la ville de demain existe déjà, le vrai enjeu, c’est comment transformer le stock. (…) Et ce progrès n’est valable et partagé que s’il rejoint l’intérêt général », martèle-t-il. Caroline Gattino, directrice commerciale Buildings France Benelux et Maghreb chez Siemens Smart Infrastructure, confirme : « la réussite viendra d’un écosystème où installateurs, bureaux d’études et usagers travaillent de concert. » À ce titre, elle considère les contraintes réglementaires induites par les décrets BACS et Tertiaire comme de véritables opportunités pour la filière.

Strasbourg, Béthune, Paris : le stock se transforme

Sur le terrain, les exemples de réussite se multiplient. Sébastien Illouz détaille celui de l’éclairage public. Entre 2023 et 2024, 500 millions d’euros ont été investis dans sa modernisation, permettant de réduire les charges de 50 à 75 %. La technologie des réseaux de chaleur offre un autre levier de transformation, qui permet à la ville de Strasbourg de récupérer l’énergie fatale d’un processus industriel situé à ses portes, pour alimenter son réseau.

Grégoire Morineaux, directeur de la stratégie ESG et des achats chez Rexel France, cite également Béthune, où plusieurs centaines d’emplacements ont été équipés d’ombrières photovoltaïques sur des sols déjà artificialisés. La logique est claire : décarboner en valorisant l’existant, optimiser l’autoconsommation tout en transformant le confort de vie. 

Edward Arkwright présente enfin Hosta, cette résidence pour jeunes actifs construite en bois sur le périphérique parisien dans le cadre de Réinventer Paris. « Ce qui est intéressant, ce n’est pas le bois en soi, c’est ce que cet immeuble a apporté. » À la ville d’abord : une jonction au-dessus du périphérique entre Paris et Vanves (Hauts-de-Seine). Aux jeunes travailleurs ensuite : confort thermique, performance énergétique et gain sur la facture. À l’opérateur social, enfin : la capacité de proposer un service à un public qui aurait été exclu du marché. 

En 2025, l’électrique passe devant

Ludovic Coutant, directeur du programme Advenir d’AVERE-France, évoque un autre tournant. En septembre 2025, le véhicule 100 % électrique a dépassé la barre des 20 % de part de marché, dépassant  pour la première fois les véhicules essence en immatriculations. Les arguments en faveur de ce basculement s’accumulent. L’électrification de la mobilité est d’abord un enjeu de souveraineté énergétique, quand la France dépense chaque année 55 milliards d’euros pour importer des hydrocarbures, principalement destinés aux transports. Au niveau individuel, les économies sont considérables : entre carburant et entretien, un Français peut espérer économiser environ 1 400 euros par an. Sans compter l’effet sur la réindustrialisation : à Douai (Nord), 1 000 employés fabriquent déjà les batteries des Renault 4 et 5. 

Le maillage des infrastructures a suivi cette dynamique. On compte désormais 2,5 millions de bornes pour 2,4 millions de véhicules électrifiés. Il y a cinq ans, on en dénombrait seulement 500 000. Un service de plus en plus présent dans l’ensemble de l’environnement urbain et facilité par le travail de démocratisation mené par des opérateurs comme Freshmile. Lequel propose ainsi l’installation clé-en-main de bornes de recharge ou encore un pass qui permet d’accéder à plus de 650 000 points de charge en Europe. 

Le logement collectif demeure cependant le grand absent de cette mutation. Seulement 30 000 bornes y ont été installées. Or un Français sur deux vit dans une copropriété , et seules 15 % d’entre elles ont validé un projet d’installation. « Cette population se sent exclue de l’électrification. », alerte Ludovic Coutant. 

Deux à trois ans pour rentrer dans ses frais

À l’issue de la table ronde, les questions du public portent naturellement sur l’accessibilité financière de cette transformation. Caroline Gattino rappelle dans la foulée que « ce que nous voyons comme un coût, c’est plutôt un investissement. » Et Ludovic Coutant d’évoquer le leasing social qui permet d’accéder à un véhicule électrique pour 150 euros par mois. « Pour les personnes qui parcourent un kilométrage conséquent, les économies sont bien supérieures aux dépenses. », insiste-t-il.

Sur le chauffage, qui représente entre 70 et 80 % du coût énergétique d’un foyer, là aussi, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Une pompe à chaleur installée en remplacement d’une chaudière à fioul permet 70 % d’économie d’énergie. « MaPrimeRénov’ existe toujours, et Rexel prend en charge la récupération de la subvention auprès des services de l’État. Les retours sur investissement vont désormais de deux à trois ans », détaille Grégoire Morineaux.

Au cœur de la transition : gouvernance et intelligence collective

Sébastien Illouz insiste une dernière fois sur la méthode. « Cette transformation doit être menée en équipe, avec une gouvernance décentralisée, pour ne laisser de côté aucune zone ou territoire. » Et Grégoire Morineaux de conclure sobrement : « L’enjeu clé, c’est l’écosystème. »

Ainsi, la smart city a changé de visage et se construit dorénavant dans l’épaisseur du réel. Entre acteurs locaux, énergéticiens et financeurs, la transition repose sur des alliances concrètes et des résultats mesurables. Le concept a laissé place au chantier et engage désormais l’ensemble du territoire.

Crédits photo : © Awen photos – Xavier Delouche-Vocourt

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Mag : La France électrique

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